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Bolaers Zipper Bass


Jazz Ad

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Cet article n'est pas vraiment un test, en fait je ne sais pas vraiment ce que ça va être.Quelque chose comme une chronique je pense, un blog sur la façon dont on se retrouve irrémédiablement accroché à un instrument.

Je n'ai jamais fait d'article complet sur cette basse, en particulier parce qu'un test aurait peu d'intérêt. C'est un modèle custom à l'extrême, unique et impossible à reproduire.

Elle revient d'un lifting chez Thibault Lecherf, luthier local évidemment de confiance, sans quoi jamais je ne lui aurais confié la prunelle de mes yeux.

Pour la petite histoire, il est l'élève et successeur à Reims de Franck Bolaers qui a assemblé cette basse.

Au menu :

Refrettage (les anciennes commençaient à ressembler à des crémaillères)

Correction de la touche (le manche a légèrement vrillé avec le temps)

Démontage des straplocks et remplacement par des attaches sangle de gros diamètre (vu que je saute moins partout et que j'utilise maintenant une courroie dédiée pour chaque basse)

Révision de l'électronique avec remplacement du potar de volume (la piste était très usée)

Ajustement du sillet (recollé à l'arrache avant un concert)

Remplacement des mécanique (les mêmes en noir, j'avais envie)

Nettoyage et lustrage (toute belle, on voit beaucoup mieux les pains maintenant)

C'était donc l'occasion de la prendre un peu en photo et de démarrer cet article. Son contenu sera peut-être intéressant, amusant, instructif, chiant comme la mort ou juste sans le moindre intérêt. M'en fous, je m'exprime et pis c'est tout.

Vues en pied

zipper_face.JPGzipper_back.JPG

Détail du dos

zipper_jazzad.JPG

Détail de la tête

zipper_headstock.JPG

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L'histoire de cette basse commence en 1984, sous la forme d'une Ibanez Roadstar II.

IbanezRoadStar2.jpg

Avance rapide jusqu'à 1992. J'ai 19 ans, je joue du clavier et Nirvana débarque sur les ondes. Gros coup de pied dans la fourmilière du rock FM propret, du jour au lendemain ou presque le clavier devient ringard et il est impossible de trouver un groupe.

La situation n'est pas acceptable, comment je vais lever de la gonzesse moi ? Il faut réagir. J'analyse rapidement mes goûts musicaux de l'époque, en évitant de trop porter mon attention sur les claviers :

http://www.youtube.com/watch?v=9NEfPHQ6LIo

http://www.youtube.com/watch?v=JJ2Op2UCozg

http://www.youtube.com/watch?v=sUPqY0lszZc

Une évidence s'impose, la basse a l'air d'être l'instrument le plus cool du monde. Puissant, omniprésent mais pas envahissant, pas obligé de faire le kéké sur le devant de la scène mais on peut quand même si on a envie.

Ça tombe très bien, la guitare m'ennuie et je suis trop fainéant pour me trimbaler une batterie.

Après avoir été achetée et jouée par je ne sais qui, ma future s'est retrouvée dans un magasin d'occaze rémois (Music Okaz) aujourd'hui disparu, à 2 pas de mon lycée.

Quelques semaines à décrasser et repeindre des machines pleines de cambouis et me voici possesseur pour 2500 FF d'une basse, d'un gigbag, d'un jack fluo et d'un mediator. L'aventure commence.

Je fais quelques boeufs, je trouve un groupe de blues qui tourne et me paye mes leçons, tout va bien. Mon prof me fait remarquer que mes cordes sont bien loin du manche, que je les casse souvent et suggère un réglage complet.

Franck Bolaers est jeune luthier, il vient de s'installer à Reims, je lui amène mon instrument et j'en profite pour tâter d'une Pedulla qu'il a en réglage.

Oh la la, ça sonne bien mieux que la mienne surtout sur le micro P, un Bartolini 8S me dit le luthier.

Le son est bien pêchu comme une Precision mais plus sombre, profond même si moins chantant dans les médiums. Ca fait bien new wave, jazz ECM, metal aussi, tout ce que j'aime jouer.

A retenir pour la suite.

Je profite de ma basse bien rêglée (avec chevalet limé !) quelques temps, puis je retourne voir Bolaers pour une première modification.

Là ça dérape, le virus du custom me prend. J'ai massacré mon pickguard en tentant de changer sa forme aussi il me propose de le supprimer (un corps tout noir c'est plus beau), de tout reboucher, de créer une défonce à l'arrière.

Comme je n'utilise la tonalité qu'ouverte ou à fond, l'électronique est remplacée par un unique volume avec push-pull pour couper les aigus. Une capa est ajoutée pour préserver les aigus lorsque je baisse le volume afin de rendre le potar utilisable sur toute sa course.

En prime je fais installer le Barto de mes rêves ainsi qu' un chevalet Schaller 3D qui ne bouffera pas mes cordes et me permet de tester divers écarts de cordes pour trouver ce qui me convient le mieux. Le sillet plastique moche est remplacé par de l'ébène. Straplocks en prime.

Voici la seule photo valable que j'ai de cette époque. On est bien avant le numérique et internet, on faisait moins d'images. On remarquera une chouette Shergold fretless en arrière plan et le susmentionné jack fluo.

detailoldbasses.jpg

C'est un peu custom à Jacky mais ça joue et ça sonne du tonnerre. Ma basse restera heureuse sous cette forme pendant plusieurs années, jusqu'à un petit incident de parcours.

L'unique potar offre des variations suffisantes mais limitées. Je compense en développant le plus de techniques de jeu possible et en variant les attaques pour apporter des variations sonores et j'apprend à égaliser avec les doigts.

Parallèlement je teste beaucoup d'effets, mon goût pour les sons synthétiques reste présent et comme je commence à avoir un peu de technique j'ai tendance à surjouer. Je relève l'action et j'utilise des grosses cordes pour me freiner un peu.

Comme je prends beaucoup (trop) de solos, je bute souvent sur les dernières cases dans les aigus. Plus de frettes ça serait pas mal.

Avec le temps j'ai appris à régler mes basses seul, je visite tout de même fréquemment Bolaers qui commence à se faire un nom et donne dans les manches conducteurs, l'électronique passive et les bois précieux.

Ses orientations influent sur mes choix qui s'affinent et s'éloignent des instruments disponibles sur le marché. Je commence à penser sérieusement à un instrument sur mesure mais je n'ai pas trop les fonds.

Je ballade ma basse partout, je dors avec, je travaille dessus 4-5 h par jour, bref je suis en pleine période de folie basse.

Arrive le printemps et j'ai de plus en plus de mal à régler avec le changement de saison. L'action est de plus en plus haute même avec une cale je ne m'en sort pas.

J'apporte ma belle chez le luthier et le verdict tombe, le trussrod est à bout et n'arrive plus à compenser la vrille que prend le manche.

Il faut envisager de changer le manche, autant dire changer de basse. Il n'y a pas de manche compatible Ibanez et quitte à changer, je veux un manche conducteur.

Pourquoi ne pas couper ma basse en deux et lui greffer un conducteur ? Ca pose plein de problème d'ajustement, en plus je n'ai pas de sous pour me faire fabriquer un manche.

Après quelques recherches, on tombe chez StewMac qui vend des manches conducteurs.

24 frettes sur touche ébène, manche une pièce d'érable sur dosse, tête renversée avec une grosse volute, c'est du sérieux et c'est pas trop cher. Le montage a l'air compliqué mais l'idée plait à Franck. C'est parti.

StewMac ne vend plus aujourd'hui ce produit que pour les guitares, dommage.

3181_1sm.jpg

Les Sperzel pour basse viennent de sortir. Blocage de cordes, changement plus rapide et meilleure stabilité, ça a l'air bien, hop on commande. Pour des raisons esthétiques, elles seront montées à l'envers sur une tête dessinée par Armelle Blary, artiste plasticienne qui à l'époque était la compagne de Bolaers.

Le design est original, ça me plait. A ce jour, mes mécaniques tournent toujours à l'envers et ça ne m'a jamais gêné.

SZ-BS-STCH.jpg

Et hop à la sauvage le luthier s'active, le corps dans la scie à ruban. Collages, recoupes, ajustements. Les cornes sont modifiées pour ressembler vaguement à une Rick (mon obsession du moment), l'arrière est raccourci au maximum, l'accès aux aigus est amélioré. Le manche est affiné pour correspondre à mon toucher.

Finalement le dessus du corps est planifié, perdant sa couleur noire. Il ne sera pas verni et le reste du corps est toujours noir. Tous les autres élements (sillet, accastillage, électronique, plaque) sont remontés.

Pas de sous pour les finitions. Le résultat est apocalyptique et déglingue à souhait. Esthétiquement c'est immonde mais ça sonne de mieux en mieux et maintenant j'ai 24 frettes et un manche top moumoute.

C'est aussi à ce moment là que j'ai trouvé la sangle Jack Daniel's que j'utilise toujours.

Elle restera sous cette forme un an encore, jusqu'à ce que j'ai des sous, l'été suivant donc. Malheureusement je n'ai aucune photo de cette période et c'est vraiment dommage, le résultat valait le coup surtout avec les marques d'ongles et les taches dans l'aulne brut exposé.

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Histoire de compenser l'absence de photos : Interlude onslapête, genre j'ai des relations dans le métier tout ça. Je n'ai pas de photo avec Marcus Miller ni John Alderete, qui l'ont aussi eue entre les mains.

manring_zipper.jpgzippertop.jpg

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Au cours de l'année j'ai donc tout le temps de rêver et de réfléchir au futur de mon instrument. Les petites idées s'accumulent.

Tiens tiens, les Leduc ont le jack dans une coquille Fender à l'arrière. Pas bête, c'est propre et pratique. Je prends.

Je joue toujours avec le pouce posé sur la vis du micro. On va la mettre à la masse, ça limitera les buzz.

La plaque de trussrod ne sert à rien, à part à pester quand on a besoin d'un réglage express. Il n'y en aura pas.

Plus j'expérimente avec les écarts de cordes sur le Schaller 3D, plus je me sens à l'aise avec un écart réduit, 16-17 mm environ.

Plus j'écoute Jannick Top, plus je me dis que le do grave ça le fait et plus je m'accorde en quintes comme lui, plus je galère.

Plus je joue en do-la-ré-sol plus je me dis que c'est vraiment bien mais qu'un mi grave est quand même plus pratique.

Malheureusement il n'y a pas de Hipshot (à l'époque Hipshot était synonyme de detuner, ils ne fabriquaient que ça) pour les Sperzel.

Plus je traine à la Clé de Sol (autre magasin rémois disparu), plus je me dis que le chevalet Steinberger de la Hohner B-Bass serait parfait pour moi. :D

UsedHohnerProBBassNAT_lg.jpg

Malheureusement, le truc est totalement introuvable en pièce détachée. Je monte donc un bateau avec l'un des vendeurs (Dom, si tu me lis, merci encore) pour obtenir la pièce en SAV.

Pas donné mais il faut savoir ce que l'on veut. Le chevalet possède des fine-tuners complètement inutiles que je vire, en plus d'un detuner complètement génial que je garde. J'ai ma pièce unique.

steinie.jpg

L'érable et l'aulne ne sont pas trop laids, c'et décidé, la basse sera en finition naturelle. Il faut décaper toute la peinture qui reste sur le corps, pas une partie de plaisir d'autant qu'il y a une couche de contreplaqué ajouté pour que la peinture tienne bien.

Les couleurs et l'esthétique recherchés sont ceux des basses 70s : Matsumoku, Ibanez Musician, BC Rich, Alembic.

Franck a dans son atelier un stock de moçutaïba, une sorte de palissandre marron foncé qui en plus d'avoir un nom improbable est extrêmement dur (plus même que l'ébène), rare et très joliment veiné.

Ce sera parfait pour habiller la tête, plaquer tout le corps afin de cacher les retouches et servir de pickguard naturel.

Tant qu'on y est, la plaque d'électronique et le sillet seront du même bois. les zones foncés seront huilés, les parties claires vernies en finition satinée (je déteste le toucher du brillant).

Il manque quelque chose à ce projet. L'instrument est élégant, prometteur, original mais pas vraiment unique. Il lui faut une signature.

Franck ne veut pas apposer son logo sur l'instrument qu'il considère plus comme une transformation qu'une réelle création. A mon avis son talent est pour beaucoup dans la réussite du projet mais je respecte sa décision.

Les parties foncées ne peuvent pas vraiment être marquées, en revanche tout le dos peut recevoir des autocollants ou dessins. J'en touche 2 mots à mon ami JJ qui touche bien sa bille en dessin.

Nous prenons une empreinte de l'instrument et commençons à délirer. Qu'est ce qui pourrait bien venir décorer cette forme, en particulier l'arrière du manche ?

Sont passés en revue : une colonne vertébrale, une onde sonore, une corde, une chaîne et son boulet, des toiles d'araignées et plein d'autres conneries.

Une nuit blanche et un pack de bière plus tard, le design est là. Fermeture éclair avec notes qui s'échappent.

Pour le délire, l'araignée est conservée, suspendue à la tirette de la fermeture, cette dernière contenant mon nom.

bassback.jpg

Prise de contact avec Franck pour coordonner le projet. Fondur, 3 couches de vernis avec de l'accroche, séchage. Ensuite l'ami JJ se met au travail.

Dessin à l'encre de chine et au Rotring, peinture acrylique après avoir vérifié la compatibilité au vernis. Séchage à nouveau et encore 2 couches de vernis en finition.

Ma basse est terminée, ou presque. L'électronique en est toujours à un micro P et j'aimerais plus de polyvalence, mais je ne sais pas encore quoi mettre et je n'ai plus un rond...

J'ai toujours des envies de Rick dans la tête. Un micro aigu de 4003 jurerait esthétiquement et les impédances s'accordent mal avec le Barto.

Les graves et médiums sont parfaits, il me faut un son aigu qui morde, sans pour autant claquer fort comme une basse moderne.

J'envisage un moment le montage de piezos mais comme je souhaite rester en passif j'abandonne vite.

Pour un bon système PJ, il faut un J humbucker. Ainsi il n'y a pas de différence de volume entre le J et le P. De plus, il n'y a pas de parasites.

Je recherche aussi de la clarté pour empiler tranquillement les effets sans récolter une bouillie sonore à la sortie. Les Wal sont très bien pour ça, en particulier grâce à la conception des micros individuels par corde.

Justement, je tombe sur une copie Rick montées en micros Bartolini 9W4J, 4 micros individuels sous le même capot. Ca sonne bien clair mais tout de même comme une Rick et c'est du Barto.

Ces micros ne se vendent que par paire. Qu'à cela ne tienne, j'en achète une paire et je revend le micro grave. Le montage se fait légèrement plus loin du chevalet qu'un J normal pour éviter le côté pincé et permettre une utilisation seule sans manquer de graves.

Une balance micro permet de doser le mélange et tout va bien. Le filtre passe bas fait l'objet de plusieurs essais afin de trouver les capacités les mieux adaptées.

Reste que parfois j'aurais besoin d'un coup de boost, histoire d'avoir un son qui s'impose C'est pour ça qu'on a l'électronique active, sauf que j'ai choisi de ne pas en avoir.

Dans ces cas là, Hendrix avait un montage pour mettre ses bobinages en série. Ok c'était sur une Strat mais pourquoi ça ne marcherait pas sur une basse en PJ ?

Les premiers essais sont concluants, la position série sort un son énorme et baveux à souhait avec beaucoup de gain mais un switch DPDT est insuffisant. Il me faut un 3PDT au moins pour un montage satisfaisant, du fait de la balance micros.

Une fois le dit switch trouvé et installé, la basse est prête à me servir en toutes circonstances. Nous sommes fin 1995.

concertOXALIS.jpg

La Zipper Bass a été jouée tous les jours ou presque sans jamais me décevoir. Sur cette planche je suis à la maison, je n'ai pas besoin de réfléchir pour jouer et bien sonner.

Depuis j'ai eu des dizaines d'autres basses, certaines que j'ai gardées et d'autres non. Les seules qui soient restées sont des modèles customisées ou entièrement fabriquées par des luthiers assez fous pour suivre mes lubies. J'en suis à 5 instruments uniques et des tas d'autres qui me trottent dans la tête.

A chaque fois j'applique la même méthodologie que pour la Zipper. Définir au plus juste mes envies et besoins, trouver le luthier et le matériel correspondants, échanger un maximum, être à l'écoute sans renoncer à l'essence du projet, ne pas me précipiter pour éviter de me rater, aller à l'essentiel et ne pas faire de compromis.

Rien n'est plus déprimant que de trouver des instruments magnifiques, fabriqués sur mesure avec soin, bradés un an après leur fabrication. C'est un échec pour le luthier tout comme pour le client.

J'espère que ma petite histoire vous aura inspiré et donné envie de tenter l'aventure. Trouver SON instrument est un réconfort immense pour un musicien, je vous souhaite à tous la même chose.

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Ah et le clin d'oeil à Music Okaz :D

Ca avait le merite d'y voir pas mal de matos un peu vintage, et d'y passer une demie journee a taper la discute et rencontrer du monde.

Pour en revenir au sujet, la Zipper pour moi c'est une histoire marrante: je la voyais souvent passer, j'ai meme fait un concert avec, et je n'ai rencontré son proprio que 12 ans plus tard !

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