L'homme est musicien de rue. Il joue à Paris. Je l'ai revu il y a quelques jours. La première fois, c'était en février, sous les néons d'un couloir du métro. Je me souviens de ses yeux noirs, plantés dans les miens qui fixaient sa belle. Du genre jaloux impulsif, à jouer des gnons si d'aventure l'envie vous aurait pris de la reluquer de trop près. Mais moi, j'avais vraiment du mal à m'en détacher de sa grand-mère à tête de lion. Faut dire, la bestiole en question, très jolie copie de Gand-Bernardel, ça court pas les boutiques des luthiers. Donc au détour d'une correspondance souterraine, le timbre presque couvert par les roulettes d'une armée de samsonite pressées? Il est des incongruités intéressantes. En début de semaine, je les ai recroisés, cette fois sur les pavés d'une placette ombragée. Il jouait à l'archet des thèmes des Beatles, de Simon et Garfunkel, de Piaf, le tout avec une justesse assez sidérante. Puis je me suis approché du couple, tout penaud, et j'ai soufflé : Jean Auray ?... ?. Le sourcil s'est levé, là? il s'est fait moins menaçant. Non, Mentec, mais à l'époque, Jean Auray travaillait à son atelier ?. Nous avons un peu devisé de lui, ancien élève de Rollez, et de sa belle, gracile depuis mon banc, et qui me paraissait maintenant énorme. J'ai finalement pris congé. Il est des situations donc le charme est tenace.